D’album en album de son projet Petite Noir qui fusionne post-punk, électronique et traditions africaines, le concept de Noirwave inventé par Yannick Ilunga s'élargit, et MotherFather ne fait pas exception à la règle.
Au lieu des hymnes de déclarations identitaires qu'il a livrées avec tant de force sur son premier album intitulé La Vie Est Belle, il tend cette fois la main aux autres, qu'il s'agisse d'une puissance supérieure ou d'une communauté de créateurs partageant les mêmes idées.
Avec un peu moins d'une demi-heure, son nouvel album MotherFather est plus concis que La Vie Est Belle, mais comme l'a démontré son EP La Maison Noir/The Black House, Yannick Ilunga est tout à fait capable de créer des déclarations artistiquement riches dans un espace pourtant restreint.
Mais malgré sa brièveté, le deuxième album de Petite Noir contient de nombreuses nuances et Yannick Ilunga a composé MotherFather avec une période de turbulences personnelles en tête, et en voyageant entre l'Europe, l'Afrique du Sud et les États-Unis, il a rencontré des artistes et des producteurs tels que Theo Croker, David Sitek, Tropics et Moshik Kop, et chaque morceau de l'album capture un son et un état d'esprit distincts.
MotherFather commence alors par l'une des juxtapositions les plus spectaculaires : Les cordes brûlantes de "777", les voix qui s'enflamment et les accords qui déferlent condensent la puissance de feu de son EP La Maison Noir/The Black House en un seul morceau. Et cela rend d'autant plus douces les cordes brumeuses et les voix posées de Yannick Ilunga et du rappeur zambien Sampa the Great sur le titre "Blurry" qui lui succède.
Alors qu'il navigue entre ces extrêmes, Yannick Ilunga se tourne vers sa foi, sur la parenthèse rayonnante et mystique de "Finding Paradise". Mais sa foi est lucide puisque sur l'excellent titre "Simple Things", il clarifie les différences entre la croyance pure et les forces de division à l'œuvre dans les religions organisées, en s’appuyant sur un rythme entraînant et sur la trompette colorée de Theo Croker.
Et si Yannick Ilunga adopte souvent une approche plus douce sur MotherFather que sur les précédents albums de Petite Noir, le fait d’attirer à lui les auditeurs lui permet d'ajouter plus de nuances à ses moments de tristesse et de joie. Il transforme la lassitude de se battre trop longtemps pour quelque chose ou quelqu'un en une chose de toute beauté sur "Numbers", tandis que la mélodie douce du titre "Play" ajoute de la douceur à son flirt.
Les sonorités détaillées de MotherFather réhaussent le mélange entre le personnel, le politique, le spirituel et le sensuel, avec les superpositions de voix, les cordes et les percussions chromatiques de "Concrete Jungle" et les tonalités ondulantes et bégayantes de "Best One" qui illustrent ses questions existentielles avec un charme surprenant.
Grâce à une écriture accessible et rigoureuse, les polarités de MotherFather ne sont jamais floues. Au contraire, c'est un voyage d'introspection qui fait de ce nouvel album de Petite Noir sa musique la plus équilibrée à ce jour.
https://petitenoir.bandcamp.com/album/motherfather