Après avoir sorti pendant plusieurs années des singles électro-disco accrocheurs qui auraient déjà dû être eux-mêmes de véritable hits, la DJ, productrice et compositrice Peggy Gou, née en Corée du Sud, a finalement franchi le pas en 2023, lorsque le titre "(It Goes Like) Nanana" est devenu viral, puis s'est imposé dans les charts du monde entier. Empruntant le son de la guitare digitalisée des premiers succès d'ATB, le morceau est une véritable madeleine de Proust de l'euro-dance de la fin des années 90, avec une accroche qui donne un sentiment indescriptible. Mais bien qu’efficace sur les dancefloors mainstreams, ce titre est loin d'être le meilleur de Peggy Gou, et il ne rend pas hommage à ses talents en tant qu'artiste.

I Hear You, son premier album tant attendu, est beaucoup plus proche du type d'album qu’étaient en droit d’attendre ses fans, soit un album qui s'inspire de ses DJ sets éclectiques, capable de refléter son évolution musicale et ses influences en dix morceaux. Il y a par ailleurs un petit quelque chose qui rappelle les albums dance des années 90 dans la façon dont cet album équilibre les singles les plus évidents et les hymnes pour festival avec des morceaux downtempo et d’autres mélanges des genres.

L'intro parlée intitulée "Your Art" propose un poème de l'artiste contemporain Olafur Eliasson et c’est aussi lui qui a conçu l'ampli d'empathie psychoacoustique que Peggy Gou porte sur la pochette de l'album et qui multiplie ses oreilles par effets de miroir.

Le morceau qu’on vient d’écouter, "Back to One", est le genre de morceau disco-house propulsif qui est devenu la signature de Peggy Gou, et il y a d'autres morceaux dans cette veine sur l'album, mais elle s'essaye aussi à de nombreuses propositions différentes.

"I Believe in Love Again" reprend par exemple la sonorité familière de l'orgue Korg utilisé dans de nombreux tubes dance, sur un motif de batterie dépouillé et avec la voix de fausset de Lenny Kravitz en mode crooner soul. La star portoricaine du rap et icône transgenre Villano Antillano est à son aise sur les synthés aériens et les rythmes hip-hop endiablés de "All That".

"Purple Horizons", un autre morceau downtempo, présente des gribouillis acides percolant à travers des échantillons vocaux hachés et des pianos rave. "Seoulsi Peggygou" est une brève et intrigante parenthèse drum'n'bass dont la mélodie est jouée au gayageum, une cithare traditionnelle coréenne.

Le sublime single de 2021 "I Go" est judicieusement inclus dans l'album, de même que le tube de Peggy Gou que nous avons évoqué plus tôt, et l'absurde "Lobster Telephone", inspiré par le surréalisme, s'inscrit davantage dans la lignée de ses excellents premiers singles que la plupart des autres titres de l'album. L'album se termine par "1+1=11", un instrumental trance dédié à l'unité sur le dancefloor. Voilà, l’album I Hear You est de qualité variable, certains titres étant nettement plus réussis que d'autres, mais dans l'ensemble, il s'agit d'un disque amusant et aventureux qui confirme le statut de Peggy Gou comme l'une des figures les plus marquantes de la musique de club actuelle.

https://peggygou.bandcamp.com/album/i-hear-you

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