TOKiMONSTA c'est le projet de Jennifer Lee, une productrice américano-coréenne originaire de Torrance, en Californie. Elle nous propose des sons sous ce nom depuis la fin des années 2000 et ses premières productions étaient du même tonneau que celles des producteurs de hip-hop instrumental affiliés à la scène Low End Theory du quartier Lincoln Heights de Los Angeles : Flying Lotus, Samiyam, Nosaj Thing ou encore Teebs.
En 2015, Jennifer Lee est diagnostiquée avec la maladie de Moyamoya, une affection rare qui entraîne une constriction ou un blocage des artères alimentant le cerveau en sang. Après avoir subi une opération, Jennifer Lee s’est retrouvée incapable de comprendre la musique.

Son cerveau reconnaît les sons individuellement, mais ne parvient pas à les assembler. Elle lutte pour composer jusqu’à finalement achever le morceau “I Wish I Could Be”, qui intègrera son album suivant, Lune Rouge. En 2018, Lune Rouge est alors nommé aux Grammy Awards dans la catégorie Meilleur album Dance/Électronique.
Lune Rouge et Oasis Nocturno (2020) sont principalement composés de morceaux pop épurés et structurés de manière conventionnelle et ce sont des albums qui évitent toute extravagance en studio qui ne servirait pas les voix des invités.


Son nouvel album intitulé Eternal Reverie conserve le même format avec des morceaux plutôt tournés vers la pop avec des chanteurs invités, mais qui se distingue par ses choix, fusionnant la sensibilité pop de TOKiMONSTA avec la touche excentrique de ses premiers beats.

Le morceau “Feel It”, qu’on vient d’écouter ressemble par exemple à un exercice de deep-house remodelé en une pulsation pop rapide, passant du club techno sombre à la grande scène. Le morceau met en avant des voix en appel-et-réponse du groupe grouptherapy. (aujourd’hui renommé PartyOf2), des hi-hats distordus et des montées typiques des morceaux big room. Un auditeur distrait pourrait percevoir le morceau comme un simple titre de club générique. Mais une écoute attentive sur un bon système audio révèle des scintillements synthétiques, des couches mélodiques discrètes et des ajustements subtils d’égalisation qui confèrent au morceau une fluidité unique.

“Lucky U” illustre parfaitement le paysage sonore général d’Eternal Reverie : des hybrides house et pop synthétisés avec luxuriance, combinant l’éclat et la finesse de la musique électronique contemporaine tout en rendant subtilement hommage aux ancêtres de la dance music.
TOKiMONSTA exploite le format album pour démontrer toute son amplitude en tant que productrice. Le morceau de clôture, “Infinity’s Embrace”, laisse entrevoir son potentiel à composer du quiet storm R&B. Le beat hip-hop hâché du titre “Sci Fi” intègre des samples de cuivres filtrés et une ligne de basse envoûtante sur laquelle Mez pose son flow, mettant en valeur son savoir-faire en production boom-bap. “Corazón / Death By Disco Pt 2” est l’héritière de “Death By Disco” de son premier album Midnight Menu, et donne un aperçu des bootlegs disco percutants que TOKiMONSTA pourrait produire.

L’album Eternal Reverie captive du début à la fin. Bien que les morceaux plus courts, “Warm Water (Interlude)” et “Eternal”, semblent inachevés, comme si TOKiMONSTA s’était arrêtée trop tôt sur des productions en pleine éclosion, ils restent vibrants et divertissants. S’il y a une frustration à ressentir, c’est d’en vouloir encore plus et il n’y a aucun faux pas à déplorer sur cet album Eternal Reverie.

https://tokimonsta.bandcamp.com/album/eternal-reverie

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